DES ILLUSIONS PAR L*APPEL AUX SENS. 213 un but choisi intentionnellement, et le pouvoir de diriger son activite intellectuelle, et de controler ses raisonnements et ses souvenirs en leur opposant d'autres raisonnements et d'autres souvenirs. Lies deux acquisitions sont coutempo- raines. La consequence la plus frappante de la premiere, c'est 1'arret d'un mouvement ; la consequence la plus frap- pante de la seconde, c'est le doute. De toutes ces analogies, on peut conclure avec une certaine securite que le fait intellectuel de la rectification et le fait moteur de la coordination et de 1'arret sont deux actes qui reconnaissent le rnerne mecanisrne. Ce mecanisme, quel est il ? La physiologie seule pouiTait nous le dire, mais les eclaircissements qu'elle nous donne sont tres vagues. On sait encore peu de chose sur ces ques- tions de dynamique nerveuse. Dans ces derniers temps, 1 on est parvenu a demontrer experiment alement qu'une excitation nerveuse peut etre detruite par une autre excitation, et qu'une contraction musculaire produite par un agent chimique peut etre suspendue par 1'application des electrodes sur le muscle, et inversement. On peut supposer que le systeme nerveux est nomialement le siege de phenomenes analogues, des pro- cessus physiologiques suspendus par des processus contraires. Nous rappelons en passant I'hypothese deja ancienne des centres d'arret, dont la fonction consisterait a moderer ou a supp rimer completement Faction des autres centres. Cette hypothese a 1'avantage d'expliquer pourquoi les reflexes spinaux augmentent d'intensite quand la moelle est sous- traite a 1'influence du cerveau, soit physiologiquement, pen- dant le sommeil, soit experiment alement, par la decapitation de 1' animal, soit pathologiquement, par 1'effet d'une myelite transverse ou de toute autre lesion etablissant une solution de continuite entre une partie de la moelle et 1'encephale. Dans les cas de ce genre, 1'action moderatrice des centres encephaliques serait suspendue, et il se produirait un pheno- mene comparable a 1'acceleration des battements du coeur par la section des pneumogastriques. On pourrait supposer un mecanisme analogue pour expliquer 1'antagonisme de deux etats de conscience et la suppression de 1'un par 1'autre. Mais la donnee sur laquelle on s'appuierait manque de soli- dite, car 1'existence des centres d'arret n'est rien moins que demontree. Beaucoup de physiologistes, Yulpian entre autres, se sont toujours montres les ennemis de cette hypo- these. 2 1 Bubnoff et Heidenhain, " Ueber Erregungs- uncl Hemnmngs-Vorgange" (Pfluger't Archiv, 1881). J Consultez ^ ce sujet les auteurs cites par M. Ribot, p. 15 et seq., et les derniers travaux de Brown-Sequard.