Ceux qui savent mieux calculer ces choses-là. que moi m’ont fait entendre, que le profit qui se retire là-dessus sur toute la depense que l’on fait pour l’armée il y a un gain de plus de 40,000 livres sterling par an. Pourvu que cela aille au profit de V.M. je suis satisfait. Il seroit bien necessaire qu’il y eût en ce pays-ci un Intendant qui eût une inspection generale; cela empecheroit bien des gens à voler.
Mr. de Schravemor a été voir la cavallerie du côté de la Comté de Down, comme il informera sans doute V.M. Je n’ai rien à ajouter, si non que les regiments de Delamere, Devonshire et Hewett sont tous composés d’officiers qui n’ont jamais vu de campagne que la dernière. Mr. Byerley, qui est Lieutenant-Colonel du regiment d’Hewett, me paroit un honnête homme et de plus appliqués, mais je ne crois pas qu’il ait jamais vu tirer un coup de pistolet. Il seroit à desirer que si V.M. lui donne le regiment, qu’ Elle y met un bon Lieutenant-Colonel. On en trouveroit bien ici qui seroient propres à cela parmi les officiers François, mais de moi-même je n’en mets pas parmi les Anglois à moins qu’ils ne le demandent.
J’ai parlé a V.M. peutêtre trop souvent des moyens pour porter des vivres avec l’armée. Van Humery (comme je lui ai dit aussi) est peu capable pour la campagne. Cependant je vois que Mr. de Schravemor le prend fort à sa protection; il en faisoit de même de Shales. Je ne pretends pas entrer dans ce secret pourquoi il le fait; mais je crois aussi qu’il est de mon devoir d’en avertir V.M., comme j’ai fait aussitôt que j’ai débarqué ici avec les troupes. Depuis que Shales est en prison et qu’il a été examiné par Sir John Topham qui a visité ses papiers, il y a trouvé cette lettre qui je n’ai pas jugé à propos qu’il laissât parmi d’autres papiers pour envoyer en Angleterre, mais qu’il falloit mieux que je l’envoyasse dans mon pacquet à V.M., laquelle peut Elle bruler apres Favoir lue si Elle juge à propos. J’aurois fait partir le dit Shales, n’etoit qu’il est malade aussi.
No. 17. — Lisburn, le 10 Fevrier, 1690. — Il y a un article dans cette Depêche du Comité d’Irlande, qui est de payer les regiments de Londonderry et Enniskillen sur le même pied que les regiments Anglois. Puisque c’est l’intention de V.M., il faudra qu’ils se mettent sur un meilleur pied; car jusques ici ces troupes-là etoient sur un pied de libertinage, et de voler et piller. C’est ce qui a été cause que le Colonel Russell ne put mener avec lui toutes les troupes d’Enniskillen que j’avois fait partir pour se saisir du poste de Sligo et de le maintenir.
Le Lieutenant-Colonel Ross du regiment de dragons de Wynn s’en va en Angleterre pour y acheter quelques selles et brides, pour raccommoder ce regiment, lequel aussi bien que toute cette cavallerie et dragons d’Enniskillen sont fort mal montés, beaucoup d’officiers et des soldâts malfaits; mais puisque V.M. leur fait une grace particulière de les vouloir payer comme des troupes levées en Angleterre, on obligera les officiers des dits regiments à avoir des officiers et soldâts mieux-faits. V.M. ordonnera, s’il lui plait, que Mr. Harbord donne quelqu’ argent au Lieutenant-Colonel Ross pour acheter les choses necessaires et pour revenir promptement.
Je me suis défendu de donner congé à tous ceux qu’il a été possible de s’en dispenser, car tous les officiers de cette armée ont une grande envie d’aller en Angleterre. Mylord Lisburne part presentement aussi, sur la permission qu’il a obtenu par un lettre de Mylord Shrewsbury. Je lui ai dit souvent ce que V.M. m’a mandé qu’il pouvoit garder les bons hommes qu’il avoit levés depuis-peu en ce pays ici, mais qu’on ne vouloit plus de ces miserables gargons Anglois et Irlandois, dont ils sont farci leurs regiments quand ils sont passés ici.
Il est arrivé ici un ministre qui dit avoir obtenu une commission en Angleterre pour être le Chapelain du regiment de Colonel Russell. J’avois deja rempli cette place d’un autre chapelain il y a deux mois; V.M. me mandera ce qu’ Elle veut que je fasse en cela; les ecclesiastiques de ce pays sont des gens peu-attachés à leurs paroisses.
V.M. me permettra que je lui fasse souvenir de ce qui regarde la train de l’artillerie ici, afin de mettre un bon officier à la place de Glaum qui est mort. Celui qui presentement gouverne tout ce train s’appelle Holloway qui est contrôleur, et je crois le seul bon officier que nous y ayons. Il sera aussi necessaire que V.M. mande quel nombre de canon Elle veut qu’on mene à l’armée, puisque je vois par quelques lettres que V.M. pourroit venir ce mettre à la tête de son armée. Il me semble qu’il seroit necessaire qu’on mena plus de canon en campagne. Glaum m’avoit parlé d’un equipage d’artillerie que V.M. a en Hollande, qu’ Elle a fait faire pour Elle, ou il y a même quelques howitzers, — lequel seroit fort utile ici. Cela est contenu dans le mémoire que j’ai fait avec Glaum avant qu’il partit d’ici. J’aurai soin de ne point laisser manquer de poudre. Mais comme ce canon peut d’être d’un calibre qui n’a pas tout-à-fait rapport à celui de La Tour [the Tower of London], il sera necessaire que V.M. donne ordres aux dits officiers de La Tour de s’en pourvoir. Il est vrai que ceux qui y sont entendent fort-peu ces choses-là, pas même à examiner les fusils que les ouvriers leur delivrent tous les jours, qui sont fort malfaits, mal-montés, et ont de mechants ressorts.
Le Colonel Cambon m’a montré une lettre de Londres, par laquelle l’on voit, que Mr. Harbord n’est pas content de lui. Cela est venue d’une lettre-de-change que Cambon avoit tirée de Mr. Harbord à Dundalk de 800 guinées, qu’il lui donna là pour faire rendre à Londres à son agent pour payer les habits de son regiment. Les marchands, qui avoient porté la lettre-de-change chez les gens de Mr. Harbord ne l’ayant pas voulu acquitter, firent leur protêt. Cela a tellement offensé Mr. Harbord qu’il en a voulu mal à toutes les troupes Francoises ici, et qu’il a dit que le regiment de Cambon n’etoit pas de 150 hommes. Je puis assurer V.M. que quoiqu’il en sont mort beaucoup depuis qu’ils sont entrés dans leur quartier d’hiver, qu’il