Prophète de malheur! oiseau noir ou démon,
Cirai-je, que tu sois un messager du diable
Ou bien que la tempête, ainsi qu'un goëmon
T'ait simplement jeté dans ce lieu pitoyable,
Dans ce logis hanté par l'horreur et l'effroi,
Valeureux naufragé, sincèrement, dis-moi
S'il est, s'il est sur terre un baume de Judée
Qui puisse encor guérir mon âme corrodée?
Le corbeau glapit: Jamais plus!
Prophète de malheur, oiseau noir ou démon,
Par ce grand ciel tendu sur nous, sorcier d'ébène
Par ce Dieu que bénit notre même limon,
Dis à ce malheureux damné chargé de peine,
Si dans le paradis qui ne doit pas cesser,
Oh! dis lui s'il pourra quelque jour embrasser
La précieuse enfant que tout son cœur adore,
La sainte enfant que les anges nomment Lénore!
Le corbeau gémit: Jamais plus!
Alors, séparons-nous! puisqu'il en est ainsi,
Hurlai-je en me dressant! Rentre aux enfers! replonge
Dans la tempete affreuse! Oh! pars! ne laisse ici
Pas une seule plume evoquant ton mensonge!—
Monstre! Fuis pour toujours mon gite inviolé;
Desaccroche ton bee de mon cosur désolé!
Va-t'en bête, maudite, et que ton spectre sorte
Et soit précipité loin, bien loin de ma porte!